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L'écritoire du baladin
L'écritoire du baladin
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26 avril 2012

Les roses fleurissent aussi en automne

 

  

Lundi matin

Dans un petit bistrot, « L’Estaminet », rue du Dauphin à Lyon. Tables de marbre blanc, simples. Émile le barman va d’un client à l’autre, attentif. La radio, en sourdine, diffuse des chansonnettes anciennes. Yves Duteil chante « Mélancolie »

Lui

Sur le coin de sa table usée par le temps, son double café fume. Il rêve en écrivant quelques mots sur son carnet en moleskine noire. Un début de poème flotte sous sa plume :

- Quand dans mes bras tu viens

- Là contre moi blottie,

- Toi la douce et tendre…

            Il soupire au temps qui passe, il regarde l’horloge au mur, il n’a pas de rendez-vous mais a conscience du temps qui file, inutile.

Elle

Une mèche lui tombe sur le front, elle entre dans le bistrot. Au passage du bar, elle commande un café, un peu allongé. Elle pose son sac sur la table à côté de lui, s’assoie. Elle tourne les pages d’une revue laissée là, machinalement, sans lire. Sa tête tourne un peu. Son regard se pose, par hasard, sur son voisin, revient à la revue. Il ne l’a pas vue. Elle porte la tasse à ses lèvres, le café est trop chaud. Attendre.

Lui

La vibration vient de la table d’à côté. Il prend conscience d’une présence. Un espace occupé. Une odeur douce de fruit. Il tourne à peine le regard. Mouvement immobile de la tête. Un mot se pose sur son esprit ; Elle est attrayante. Pourquoi ce mot, il ne sait pas. Peut-être par son élégance. Celle de ses vêtements, simples. Aussi celle des gestes qui touchent la revue, de son regard qui oscille dans les hésitations de sa pensée.

            Il vit mal sa solitude, une phrase, banale vient, s’échappe de ses lèvres :

- Vous aimez le café du matin ?

Elle

La surprise fait frissonner son dos. Sa tête tourne, son visage reste neutre. Mais ses yeux l’on vu, une vibration sympathique s’installe sur ses tempes. Il est séduisant malgré son âge et ses cheveux blancs. Des sillons sur son visage marquent ses expériences. Elle ne se sent pas obligée de répondre à la question, mais une réponse également banale arrive portée par un sourire. Sourire calme, simple qui passe sur le visage, son regard et ses lèvres en sont le reflet.

- Oui, il m’aide à passer la dernière porte du réveil.

Lui

Sa tête repose dans sa main, le coude en appui sur la table, manifeste une attention excessive à la réponse. Il entend, il écoute, seul son regard réagit, il la regarde. Seul un sourire tendre, un peu fatigué donne de la lumière à son visage.

Elle

Sa phrase a filé, elle le regarde, elle voit ses yeux, au fond, elle aperçoit son esprit. Elle y observe une sincérité forte. Elle regarde ses épaules, il est solide et il doit être bon de s’appuyer dessus.

Elle ne parle pas, et dans le silence seuls les regards se parlent, envisagent, projettent.

Lui

Ses lèvres bougent, leur mouvement, anticipe le son. Un murmure.

- Je vous attendais, merci d’être venue.

Elle

Mais que dites-vous. Je ne suis venue ici que pour prendre un café.

Lui

Non, vous êtes venue à ma rencontre.

Elle

Nous ne nous connaissons pas, nous ne nous sommes jamais rencontrés.

Lui

Et alors !

Elle

Mais… Excusez-moi, il faut que j’aille à mon travail…

Lui

Alors, je vous souhaite une belle journée, à demain.

Elle

À demain ?

Lui

Oui, à demain matin, ici.

Elle

Vous êtes fou, ce n’est pas possible.

Lui

À demain.

 

Elle passe au bar pour régler son café, elle sent le regard sur ses épaules et sur ses hanches. Elle passe la porte, seul ses cils font un signe d’au-revoir. Lui se tasse sur la banquette, un sourire simple sur son visage pas même conquérant.

 

Mardi matin

Dans le bistrot, une odeur de propre du matin voisine avec celle des café. Émile le gérant arbore un magnifique tablier noir neuf dont la broderie rouge vante les mérites du beaujolais nouveau. Le ciel au-dessus de la rue étroite reste gris, un peu tristounet

Elle

Un mouvement de la tête pour avoir une vision panoramique du bar, il n’est pas là. La table où l’homme a ses habitudes est inoccupée. Sans réfléchir, elle s’y installe. Elle perçoit l'absence comme une tristesse qui l’envahit. Elle se sent stupide, adolescente stupide. Elle si fière de son indépendance, de son autonomie. Elle a brusquement le sentiment d’avoir répondu à une convocation, cela n’est pas possible, ce n’est pas vrai, pas elle ! Elle est furieuse, elle espère.

Lui

Son pas rapide marque le tempo caractéristique d’un régiment qui remonterait la rue. Plusieurs mètres en avance, sa main se tend, s’étend pour attraper la poignée. La porte est poussée fermement avec douceur. Il la voit, à sa propre place, un sourire explose sur son visage.

Elle

Un sourire aquarelle son visage, elle le regarde s’installer à la table qu’elle occupait hier. Elle le regarde franchement comme une gageure alors qu’ils n’ont dit aucun mot. Elle regarde, observe ses gestes pour ôter sa veste, son écharpe, les poser soigneusement sur la patère, son cartable posé en diagonale sur la table.

Lui

Grand sourire rieur lorsqu’il s’assoie. Il lance d’une voix forte sa commande : Un grand café s’il vous plait Émile. Il tourne la tête et la regarde dans les yeux, cherche le partage de la volonté d’être là. Il tend la main pour saisir la main de la table voisine. Cette main se retire. Merci d’être venue.

Elle

Mais, monsieur, je ne suis pas venue, juste passé par habitude.

Lui

Non, nous avions rendez-vous.

Elle

Absolument pas !

Lui

Bien sûr que si !

Elle

Vous alors !

Lui

Donnez-moi votre main s’il vous plait.

Sans attendre de réponse, il lui prend la main qui n’offre pas de résistance et qui se fait docile dans le creux de la sienne.

Elle

Elle ressent protégée par la douceur, la chaleur du contact. Elle se sent folle. Elle pense à ses amis qui seraient étonnés s’ils la voyaient. Elle s’en fout.

Elle le regarde, ses yeux apparaissent fatigués.

Pardonnez-moi, il ne faut pas…

Lui

Il serre sa main pour retenir celle qu’il a comme un cadeau. Il ne veut pas qu’elle s’échappe. En la retenant, il veut maintenir l’instant, arrêter le temps.

Vous n’êtes pas folle, vous êtes belle, belle dans l’intérieur de votre être. Je ne vous connais pas, mais je le sens. Je le perçois dans ma certitude.

Elle

Reste dans son silence, attentive, prisonnière consentante. Ses yeux se posent sur les mains. Magma de vie et de sensibilité tactile. Un soupir discret s’échappe de sa gorge.

Lui

Allons marcher.

Il règle le café en laissant quelques pièces sur la table. Il lui tend la main.

Elle

Elle le regarde comme effrayée, puis son regard s’apaise, elle hésite, elle se lève. Elle voit ses jambes se déplier pour créer le mouvement, elle est étonnée.

Lui

Passe la porte, tend sa main pour accueillir la main fine qui vient à sa rencontre. Il sent le regard du barman amusé, peut-être envieux. Il serre la main qui se pose dans la sienne.

Elle

Elle ajuste son pas sur le sien, lent, un pas de promenade. Elle sent la main qui se pose sur son épaule. Chaleur. Elle sent la main qui la tire, l’attire vers lui, elle accepte le mouvement, sa tête chute vers le creux de l’épaule, se cale ici, elle est bien.

Lui

Son bras maintient le contact, ferme mais sans force, il se tourne, pose un léger baiser sur le duvet de la joue. Il aperçoit juste un coin de l’œil qui brille. Une esquisse de larme ? Sa voix se fait basse douce :

- C’est vrai, je t’attendais, je savais que tu viendrais. Je ne savais pas qui tu étais, comment tu étais, mais je t’attendais. Mon cœur, mon esprit, mon corps, tout en moi t’attendait, tu es là, je suis là, nous sommes vivants.

Elle

Il y a trois nuits, j’ai rêvé. Je ne me souviens que rarement de mes rêves. Celui-là si. Je me souviens plus du visage ; sans doute le tien. Enfin, peut-être, peu importe. Un homme élégant devait me prendre la main et m’emmener. Tu l’as fait, c’est bien.

Lui

Élégant, - Merci. Moi aussi j’aime comme tu es. Ton allure. Le choix précis de tes vêtements. J’aime ton visage et dans ton visage, ton regard. Il me donne une émotion juvénile. Il y a tant de messages dans ton regard ! Tu ne sais pas trahir.

Elle

Mais comment peux-tu dire cela ! Nous n’avons que quelques minutes en commun, à peine une heure.

Lui

Faut-il rester une heure devant un tableau de Renoir pour en percevoir la beauté, la douceur, l’humanité ?

Faut-il rester une heure devant une œuvre de Camille Claudel pour ressentir l’envie de lui prendre la main, de la caresser, de l’aimer ?

Elle

Tu es fou, me comparer aux œuvres de Camille Claudel, de Renoir, c’est de la folie.

Lui

Toi aussi tu m’as dit que tu étais folle, cheminons ensemble vers les chemins de la sagesse folle. Rêvons ensemble, mais crois-moi, je suis convaincu de la validité de mes comparaisons.

Elle

Ma tête est bien sur ton épaule qui est solide. Cela me fait du bien de la poser. Hélas, j’arrive devant mon bureau, je dois te quitter.

Lui

Quittons-nous dans le bonheur, je veux te voir sourire en me quittant. Notre sourire sera le bonheur fébrile de l’attente.

Elle

Merci pour ta main. À demain ?

Lui

Bien sûr, à demain.

 

Il se penche vers elle et le baiser qu’il pose sur sa joue, glisse sur la commissure des lèvres, juste pour connaître le goût de sa bouche.

 

Mercredi matin

 

Elle

Elle tend la main vers la large poignée de la porte du bistrot. Un bras la contourne, une main se pose sur la sienne.

- Je ne t’ai pas entendu, mais j’ai senti ta présence. J’ai senti l’énergie que ton corps dégage se confondre avec la mienne. Viens entrons.

Lui

Entrons. Je suis heureux que nous soyons ensemble, au même moment à notre rendez-vous. Puis-je t’embrasser ?

 

Derrière la porte à peine fermée du bistrot, ils s’enlacent, les bras de l’un serrent le torse de l’autre dans une symétrie parfaite. Émile les regarde, amusé, ému. Il se jure de mettre, un jour, un panneau sur la porte avec la mention : « Ici, il y a eu un miracle ! »

 

Lui

Viens à côté de moi, je veux ressentir ta présence. Émile, deux thés citron s’il vous plait !

Elle

Aujourd’hui nous n’avons besoin que d’une seule table. Il fait chaud auprès de toi. Serre ton bras sur mon épaule, protège-moi, j’ai peur.

Lui

Tu as peur ? Quel est ton agresseur, qui t’effraie ainsi ?

Elle

La vie. Pardonne-moi, j’ai de la difficulté à croire à la vérité de ce que nous vivons.

Lui

Moi aussi, j’ai cette sensation. Pose ta main sur la mienne. Oui, là, maintenant pince la peau.

Elle

Comme ça ?

Lui

Aïe ! Oui tu existes vraiment. J’existe vraiment, nous existons ensemble.

Elle

Oui, rassure-toi, nous existons.- Merci Émile, votre café sent bon ! – On trinque ?

Comme lui, elle lève sa tasse, un petit choc qui tinte comme deux coupes de champagne.

Qu’est-ce qui est en train de naître ? À quoi trinquons-nous ?

Lui

À l’amour.

Elle

Chut ! N’emploie pas ce mot là, c’est trop tôt !

Lui

D’accord, j’attendrai demain !

 

Éclat de rire réciproque pendant qu’ils avalent la première gorgée de thé. Derrière, le bruit des rires, un silence tendre s’installe. Émile, écoute discrètement avec eux ce silence. Fier que son petit bistrot soit un écrin pour ces amoureux de la vie.

 

Lui

Je voudrai savoir…

Elle

Que veux-tu savoir…

Lui

J’hésite, je ne voudrai pas… Je ne voudrai pas être indiscret…

Elle

Tu sais, je suis capable de ne pas répondre. Tu veux savoir qui je suis, ce que je suis.

Lui

Oui !

Elle

Moi aussi, j’ai besoin de savoir, de connaitre qui tu es. Mais toi aussi tu peux avoir ton jardin bien à toi.

 

Pendant un moment, les mots passent, s’échangent, se précisent, se vérifient. Ils arrivent seuls ou par saccades. Ils sont légers ou lourds, ils se posent, ils volent. Ils sont affirmatifs, interrogatifs, jamais négatifs. Ils font rire ou ils font perler une larme d’émotion. Ils sont riches.

Ils se regardent comme épuisés par ce débit, par la confiance qu’ils ont perçu dans les paroles de l’autre.

Chacun est étonné de ce qu’il a osé dire dans ce climat de confiance pure.

 

Elle

L’heure est déjà passée pour mon travail, je dois partir.

Lui

Va, maintenant que je sais combien tu aimes ce que tu fais. Je suis admiratif de ta réussite professionnelle.

Elle

Tu es gentil. Embrasse-moi vraiment maintenant, j’en ai envie.

 

Les lèvres dansent des joues aux lèvres de l’autre. Les pointes de langue vérifient si la bouche de l’autre a un goût de dessert.

Émile tourne la tête.

 

Lui

À demain…

Elle

Non, demain matin, je ne pourrai pas être là.

Lui

Quelle tristesse ! Alors garde moi du temps pour aller au restaurant le soir.

Elle

Belle idée, cela me fera plaisir, je te laisse choisir, où tu veux, comme tu veux. Demain, nous débuterons par une journée lentilles pour finir par une journée caviar !

Lui

Qu’est-ce que tu dis ?

Elle

 Ne te prends pas la tête, c’est ma manière de parler. Mais tu l’as déjà compris, je suis un peu folle !

Lui

Un peu ?

Elle

Va savoir !

 

Lui

Un éclat de rire ricoche encore entre les murs du bistrot quand elle a déjà passé la porte. – Émile ! Un autre thé s’il vous plait.

Émile

Elle est très jolie…

 

Jeudi matin

 

Lui

Il entre dans le bistrot, il sourit à Émile qui lui fait un signe pour le café. Un sourire plein de brouillard.

Émile

S’approche et pose la grande tasse de café et le verre d’eau fraîche. Il se penche vers lui et demande à voix basse : - Elle ne vient pas aujourd’hui ? Vous semblez triste d’être seul… Voulez-vous un journal ?

Lui

Merci Émile, oui, donnez-moi un journal, mais rien qu’avec des bonnes nouvelles ! Je vais rester un moment pour écrire dans mon calepin.

Émile

Tant que vous voulez ! D’ailleurs, il n’y a pas beaucoup de passage ce matin.

Lui

Il feuillette rapidement le journal en haussant les épaules. Il n’arrive pas à se déterminer entre les bêtises de gauche et les stupidités de droite. Il repose le journal, gribouille un peu sur le calepin, puis les mots viennent, indépendants de son esprit, se posent d’autorité sur le papier et guident sa plume. Les rimes dansent en musique :

Toi ma douce,

Quand dans mes bras tu viens

Là contre moi blottie

Toi la douce et tendre

Il ne me manque rien

Car le chemin du paradis

Est la seule route à prendre.

Lui

Il jette un coup d’œil à la pendule murale. Il est étonné que le temps ait passé si vite. Il finit une dernière goutte du deuxième café servi par Émile. Il se lève, la monnaie à la main, la pose sur le comptoir.

Lui

Salut Émile, à bientôt. La réponse d’Émile l’accompagne quand il passe la porte.

Dans la petite rue où l’herbe pousse encore entre les pavés, il lève les yeux au ciel vers un ciel gris. Seul un bout de ciel bleu apparait dans la grisaille. – Tiens, moi aussi j’ai un bout de ciel bleu dans ma tête, ce sera ce soir…

 

Jeudi soir

 

Lui

Au moment où le jour s’apaise, il est assis sur le tabouret du bistrot et discute avec Émile. Comme ils ne discutent que de banalités, il s’étonne du grand sourire de son interlocuteur. Sans avoir le temps de l’interpréter, il sent une pression sur ses épaules et des lèvres qui se posent sur son cou. Il est vexé, peut-être même honteux de ne pas l’avoir sentie arrivée.

Elle

Bonjour bel homme !

Lui

Bonjour jolie dame. Oh, attend, recule toi ! C’est pour moi que tu t’es faite si belle ? Quelle chance j’ai ! Tu es magnifique !

 

Émile s’est éloigné de son bar en souriant.

 

Elle

Elle se recule d’un pas et se laisse admirer en riant. Pantalon de velours noir avec un boléro qui cache à peine un chemisier dont le haut transparent permet de deviner des trésors à découvrir. Se tournant vers lui, elle l’apostrophe : - Vous êtes aussi très élégant cher monsieur ! Un vrai gentleman. Vous avez belle allure.

Lui

Puis-je chère madame sur un coin de votre joue, déposer un baiser en hommage à votre beauté ?

Bien sûr il avance sa bouche vers la joue qui se dérobe pour laisser place à des lèvres à peine entrouvertes.

Instinctivement le baiser se fait plus passionné dans la solitude du bistrot, Émile s’étant trouvé une occupation sans doute importante dans sa cuisine.

Elle

Elle respire un peu, son visage et ses yeux laissent discerner une étrange brillance.

- Monsieur m’a-t-il invitée pour seulement m’embrasser ou pour m’emmener au restaurant ?

Lui

Allez savoir chère Madame, mais l’un n’est pas exclusif de l’autre !

 

C’est main dans la main qu’ils passent la porte avec un sonore :

- À bientôt Émile !

Ce dernier apparait à la porte de sa cuisine et se contente d’un signe amical de la main. Dans la rue, ils marchent en se tenant la main, les doigts se croisent, se décroisent, se cherchent, se perdent, se retrouvent dans le dédale du bonheur d’un menuet. Puis, au passage d’un trottoir, la main cherche la taille, la trouve, s’y appuie, enserre. Dans un passage plus étroit, au croisement d’autres piétons, la main glisse dans le dos, se pose sur l’épaule, effleure la nuque, joue un instant avec les mèches en écoutant les vibrations émises par ce contact. Cette main assure sa présence en profitant d’un instant de bavardage lorsqu’ils arrivent devant l’entrée du restaurant. Porte vitrée moderne sur un encadrement de pierres anciennes.

 

Lui

J’ai choisi ce restaurant parce qu’il est beau. Je voulais pour ce premier repas que nous partageons, une sorte d’écrin pour protéger ce moment de grande valeur. J’espère qu’il sera bon car j’ai relevé son nom dans la liste des rendez-vous gastronomiques de notre ville

Elle

Souriante, les yeux levés vers le sourire qui la regarde :

Pour cela je prends votre invitation pour un cadeau, je ne doute pas de la qualité du cadeau, et j’apprécie son emballage, son écrin

 

Accueil cordial du personnel belle table ronde, isolée, deux assiettes blanches, face à face, et avant qu’ils ne soient assis, les assiettes sont côte à côte, par des gestes naturels, à peine marqués. La main de l’un passe dans la main de l’autre, la presse légèrement au fil des mots du bavardage

 

Lui

Puis-je lever mon verre à notre rencontre, à ma chance d’avoir votre présence, votre élégance à mes côtés.

Elle

Moi aussi, je suis heureuse d’être là, vous êtes un homme rassurant.

Lui

Rassurant ?

Elle.

Oui. Votre allure, vos épaules semblent solides, pas seulement au sens physique. J’aime la douceur de votre voix, le calme avec lequel vous parlez.

Lui

Mais, que me dites-vous ! Vous êtes en train de me séduire avec les jolis mots que vous me dites.

Elle

En riant :

- Seulement avec les mots ?

Lui

Vous êtes superbe quand vous riez ! Non, ce n’est pas seulement avec les mots que je vous trouve séduisante, j’aime bien regarder votre visage.

Elle

Mon visage ?

Lui

Oui. Il est harmonieux, sa forme, sa luminosité. J’aime bien regarder votre visage et même un peu en dessous.

Elle

Coquin !

 

Le repas se poursuit sous l’œil amusé du serveur qui constate que l’espace entre les deux chaises s’est encore réduit.

Fin de repas, note réglée avec discrétion. Veste tendue posée sur les épaules, effleurement. Ils se retrouvent dans la fraîcheur de la petite rue.

Elle

Ses mains enserrent les mains de l’homme. Son regard devient sourire.

- Merci pour ce repas, pour ce moment.

Lui

Moi aussi je vous remercie pour ce moment partagé, j’ai beaucoup de plaisir à être avec vous, de vous regarder, de vous écouter. Voulez-vous une promenade au hasard des rues ?

Elle

Pourquoi pas, mais ma journée a été un peu chargée et je suis fatiguée ce soir. Puis-je vous offrir un verre pour vous remercier de ce délicieux repas ?

Lui

Volontiers, c’est gentil, où voulez-vous aller ?

Elle

Pourquoi pas chez moi, ce n’est pas très loin.

Lui

Je serai ravi de découvrir là où vous vivez. Ce doit-être un endroit bien décoré.

Elle

À votre avis, quelle est la couleur dominante ?

Lui

Oh, La question est difficile !

Elle

Laissez aller votre intuition.

Lui

Alors, je le vois beige, crème, rehaussé de tons rouges, non plutôt bordeaux.

Pourquoi souriez-vous ?

Elle

Vous verrez…

 

Elle sourit encore en ouvrant la portière de sa voiture. Elle sourit toujours, un moment plus tard quand elle pousse la porte de l’appartement.

Il entre à sa suite, son regard survole la pièce de séjour. Le canapé et les fauteuils sont beiges, presque jaunes, à la grande baie vitrée, des voilages crème et grenat pendent avec élégance.

 

Lui

J’ai gagné ?

Elle

Ce n’était pas trop mal

 

Ils s’installent sur le canapé, oubliant qu’ils étaient venus là pour prendre un verre. Une tête se pose au creux d’une épaule, les baisers deviennent plus élaborés. Les doigts découvrent d’autres courbes, d’autres territoires. Une main effleure une nuque sur laquelle se dépose un baiser là où les cheveux laissent place à la peau douce.

 

Elle

Oui, là, c’est agréable, j’aime…

Lui

Il sait maintenant qu’il ne rentrera chez lui que très tard, demain sans doute.

 

 

© Pierre Delphin – avril 2012 –

 

 

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Commentaires
S
Vous devriez écrire un roman d'amour, Pierre. Encore une histoire pleine de tendresse et de sensualité.. <br /> <br /> <br /> <br /> cassiopee.binhoster.com
A
F.abuleuse écriture qui illumine le plaisir de te lire <br /> <br /> E.xcellence et maestriades des mots et du verbe <br /> <br /> L.e travail et ta volonté ne peuvent qu’être récompensés<br /> <br /> I.mpossible de ne pas être touché par ces pages<br /> <br /> C.ompétence aujourd'hui couronnée de laurier<br /> <br /> I.ncomparable lecture, j’en attends son épilogue<br /> <br /> T.on écriture immanquablement menera à la réussite<br /> <br /> A. mes yeux, de ton projet de publier ton livre<br /> <br /> T.u mérites vraiment un si beau dénouement<br /> <br /> I.noubliables moments de liesse que tu vivras<br /> <br /> O.uverture d'un monde nouveau empli de bonheur<br /> <br /> N.e trouvant pas les mots pour exprimer ces<br /> <br /> S.entiments, je vais résumer par un simple : <br /> <br /> <br /> <br /> Félicitations
L'écritoire du baladin
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